Bodhicaryāvatāra — Chapitre 3
Par Śāntideva
Excerpted from Lotsawa House translated by Adam Pearcey and Christian Magis.
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Je célèbre avec joie tous les actes vertueux
Qui allègent les peines des royaumes inférieurs,
Et je me réjouis aussi quand ceux qui souffrent
Trouvent le bonheur.
—
Je me réjouis de l’accumulation de vertus
Qui est la cause de l’Éveil,
Et de la libération définitive
Des êtres des peines du samsâra.
—
L’Éveil des bouddhas m’emplit de joie
Ainsi que les bhûmi atteints par les bodhisattvas.
—
L’allégresse me saisit à l’évocation de cet océan de vertus
Qu’est la noble intention de la bodhicitta,
Dont le but est d’obtenir le bonheur pour tous les êtres
Et dont l’activité est, pour tous, bénéfique.
—
Je joins maintenant les mains et vous prie,
Bouddhas de toutes les directions,
De faire briller la lampe du Dharma sur nous
Qui souffrons dans l’obscurité de la confusion.
—
Les mains jointes sur le cœur,
J’enjoins tous les bouddhas aspirant au nirvâna
De ne pas nous abandonner aveugles et seuls,
Mais de demeurer parmi nous pour d’innombrables kalpas.
—
Grâce à toutes les vertus
Que j’ai ainsi accumulées,
Puissé-je être pour tous les êtres
Celui qui calme la douleur.
—
Puissé-je être médecin et remède,
Puissé-je être celui qui soigne
Jusqu’à la guérison complète
Tous ceux qui souffrent en ce monde.
—
Faisant tomber en pluis mets et boissons,
Puissé-je éliminer la faim et la soif,
Et dans les temps de pénurie et de famine,
Puissé-je devenir moi-même nourriture et boisson.
—
Pour tous ceux qui sont pauvres et démunis,
Puissé-je être un trésor aux ressources inépuisables,
La source de tout ce dont ils ont besoin,
À portée de main et toujours accessible.
—
Mon propre corps et toutes mes possessions,
Mes mérites passés, présents et futurs,
Je les dédie en totalité, n’en retenant aucun,
Pour le bienfait des êtres.
—
C’est en lâchant prise de tout que j’atteindrai le nirvana,
Cet état qui transcende la souffrance ;
Puisque tout doit, un jour, être abandonné,
Il vaut mieux que, dès maintenant, je le distribue.
—
J’ai maintenant renoncé à mon corps,
Et l’ai donné pour le bien de tout ce qui vit.
Qu’ils le tuent, le battent et le maltraitent,
Qu’ils en fassent ce que bon leur semble.
—
Et s’ils le traitent comme leur jouet,
S’ils le tournent en objet de ridicule et de moquerie,
Puisque je leur en ai fait don,
Pourquoi en prendrai-je ombrage ?
—
Qu’ils fassent de moi ce qu’ils veulent :
Tout, hormis ce qui leur causerait tort.
Et puisse cela servir d’enseignement
À quiconque en serait le témoin.
—
Si, juste en me voyant, d’autres sont inspirés
De pensées de colère ou de dévotion,
Puissent ces pensées éternellement
Servir à combler leurs désirs.
—
Puissent ceux qui m’insultent ouvertement,
Ceux qui me nuisent autrement,
Même ceux qui me rabaissent en secret,
Trouver le bonheur de l’Éveil.
—
Puissé-je être le protecteur des abandonnés,
Le guide de ceux qui cheminent,
Et pour ceux qui aspirent à l’autre rive,
Être une barque, un pont, un gué.
—
Puissé-je être une île à qui souhaite toucher terre,
Une lampe à qui cherche la lumière,
Un lit pour qui désire le repos,
Un serviteur pour qui vit dans le besoin.
—
Puissé-je être un joyau qui exauce les souhaits, un vase merveilleux,
Un puissant mantra ou un remède infaillible ;
Puissé-je devenir cet arbre miraculeux qui comble les vœux,
Une vache d’abondance, nourrice du monde.
—
De même que l’espace,
La terre et les éléments,
Puissé-je toujours soutenir la vie
Des êtres en nombre illimité.
—
Et tant qu’elles ne seront pas libérées de la souffrance,
Puissé-je aussi être source de vie
Pour les créatures innombrables
Qui peuplent l’espace infini.
—
Tout comme les sugata des temps passés
Ont réalisé la bodhicitta
Et se sont établis progressivement
Dans l’entraînement d’un bodhisattva,
—
De même, pour le bien des êtres,
J’éveillerai la bodhicitta
Et m’entraînerai moi aussi
Graduellement dans ces disciplines.
—
Ainsi, tous ceux dont l’esprit est avisé,
Et qui ont adopté la bodhicitta avec joie,
Pourront, afin de la développer davantage,
En faire l’éloge de la manière qui suit :
—
Aujourd’hui, ma naissance est devenue fructueuse ;
J’ai bien obtenu une existence humaine.
Aujourd’hui, je nais dans la famille du Bouddha,
Je suis maintenant un fils (une fille) de Bouddha.
—
Désormais, j’accomplirai
Les actions dignes de ma famille,
Je ne ferai pas tache
Dans cette noble famille sans défauts.
—
Comme un aveugle
Qui trouve un joyau dans un tas d’ordures,
Ainsi s’est levée en moi,
Par quelque coïncidence heureuse, la bodhicitta.
—
C’est l’élixir suprême
Qui abolit la souveraineté de la mort,
Le trésor inépuisable
Qui élimine la misère du monde,
—
Le remède incomparable
Qui guérit les maladies du monde,
L’arbre qui abrite tous les êtres
Las d’errer sur les chemins de l’existence conditionnée,
—
Le pont universel
Qui mène à la libération des existences douloureuses,
La lune de l’esprit qui se lève
Et apaise la brûlure des passions du monde,
—
Le grand soleil qui finalement dissipe
Les brumes de l’ignorance du monde,
Le beurre le plus fin, baratté à partir
Du lait du Dharma sacré.
—
Aux êtres qui errent sur les chemins de l’existence
Et cherchent à en goûter les joies,
Elle offre le bonheur le plus élevé,
Satisfaisant ces éternels vagabonds.
—
Aujourd’hui en présence de tous les protecteurs,
Je convie tous les êtres à l’état de sugata
Et, en attendant, au bonheur.
Que les dieux, les asuras et tous les autres se réjouissent !
———
My own body and all that I possess,
My past, present and future virtues—
I dedicate them all, withholding nothing,
To bring about the benefit of beings.
By letting go of all I shall attain nirvāṇa,
The transcendence of misery I seek,
Since everything must finally be abandoned,
It would be best if I gave it all away.
This body of mine I have now given up,
Entirely for the pleasure of all who live.
Let them kill it, beat it and abuse it,
Forever doing with it as they please.
And if they treat it like a toy,
Or an object of ridicule and jest,
When I have given it away,
Why should I then become upset?
Let them do to me as they please,
Whatever does not harm them;
And when anyone should think of me,
May that only serve them well.
If the sight of me inspires in others
Thoughts of anger or devotion,
May such states of mind be causes
For eternally fulfilling their desires.
May those who insult me to my face,
Or cause me harm in any other way,
Even those who disparage me in secret,
Have the good fortune to awaken.
May I be a guard for those without one,
A guide for all who journey on the road,
May I become a boat, a raft or bridge,
For all who wish to cross the water.
May I be an isle for those desiring landfall,
And a lamp for those who wish for light,
May I be a bed for those who need to rest,
And a servant for all who live in need.
May I become a wishing jewel, a magic vase,
A powerful mantra and a medicine of wonder.
May I be a tree of miracles granting every wish,
And a cow of plenty sustaining all the world.
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